La voiture électrique est encore régulièrement décriée pour son impact supposé négatif sur l’environnement, notamment la fabrication de sa batterie au lithium-ion. Pourtant dans la majorité des cas, elle a un meilleur impact qu’une voiture thermique. Pour en avoir le cœur net, revenons ici sur les fondamentaux : quel est vraiment le bilan carbone d’une voiture électrique ? Quelles pistes peut-on envisager pour réduire cet impact dans les années qui viennent ?
L’empreinte carbone est un indicateur qui vise à mesurer l’impact d’une activité sur l’environnement, et plus particulièrement les émissions de gaz à effet de serre liées à cette activité. Dans le cas concret des voitures, il s’agit de comptabiliser les tonnes de gaz à effet de serre émis par :
Le dioxyde de carbone (CO2) est le gaz à effet de serre le plus répandu. Sachez néanmoins qu’il en existe cinq autres ! Mais dans le cas précis des véhicules à essence, la loi Euro 6 impose depuis 2014 un plafond d’émissions pour 6 polluants distincts :
Types de polluants | Taux d'émission maximum (g/km) |
---|---|
Monoxyde de carbone (CO) | 1,000 |
Hydrocarbure (HC) | 0,100 |
Oxydes d'azote (NOx) | 0,060 |
Hydrocarbure + Oxydes d'azote | - |
Particules (pour un moteur à injection direct) | 0,005 |
Hydrocarbures non méthaniques (HCNM) | 0,068 |
La voiture individuelle fait partie des 3 plus gros postes d'émissions d'un citoyen français, avec le résidentiel tertiaire (le logement) et l'agriculture. Pour un Français, la voiture représente 2,3 tCO2e/an (dont la consommation de carburants pour 1,1 t CO2e, et la fabrication et l’entretien des véhicules pour 0,5 t CO2e), selon le gouvernement.
Distinguons plusieurs étapes clefs pour faire le bilan carbone d’un véhicule électrique 🚗. Il y a :
Pour les véhicules électriques, l'Ademe distingue la fabrication du véhicule et celle de sa batterie. Elle propose les équivalences suivantes pour les facteurs d'émissions :
Le facteur d'émission associé à la fabrication d'un véhicule électrique de moyenne gamme est de 83.6 gCO2e/km. Très proche de la valeur publiée par Tesla dans son dernier rapport d’impact pour son modèle 3 produit aux Etats-Unis (88,55 gCO2/km).
Dans ce même rapport, notons tout de même que la batterie compte pour 45% de l'empreinte carbone de la fabrication d'une voiture !
La consommation moyenne des voitures électriques se situe généralement entre 15 et 25 kWh pour 100 kilomètres.
La variation de la consommation se fait en fonction de la température extérieure, des conditions de vent et de l’habitude de conduite de l’utilisateur. On prend généralement comme valeur moyenne 20 kWh pour 100 km.
En s’appuyant sur le facteur d’émission du mix électrique français en 2020 (0,0599 kgCO2e/kWh) nous obtenons des émissions moyennes de 0,01198 kgCO2e par kilomètre pour un véhicule électrique.
En parcourant 10 000 kilomètres en France, un véhicule électrique émet donc, fabrication et utilisation incluse, environ 956 kgCO2e.
Fabrication | 836 kgCO2e |
Utilisation | 120 kgCO2e |
Total | 956 kgCO2e |
Le passage à la voiture électrique représente une rupture importante avec notre économie actuelle, encore largement dépendante des énergies fossiles. C’est une étape nécessaire mais la transition est particulièrement difficile pour la majorité des acteurs industriels en place.
Le « Diesel Gate » en constitue une bonne illustration. Considéré comme l’un des plus gros scandales industriels (et sanitaires) de ces dernières années. il a mis en lumière l’utilisation par le groupe Volkswagen, de 2009 à 2015, de différentes techniques visant à réduire frauduleusement les émissions polluantes (de NOx et de CO2) de certains de ses moteurs diesel et essence lors des tests d'homologation.
Il existe plusieurs incitations financières publiques pour inciter à passer à l’électrique. Les montants des aides varient en fonction du revenu fiscal, du prix de la voiture de votre localisation, et si vous rendez un autre véhicule.
🖐 Bon à savoir : le dispositif Tremplin pour la transition écologique mis en place par l'ADEME permet d'aider financièrement les PME souhaitant remplacer leurs véhicules thermiques par des véhicules électriques.
Il existe aussi un crédit d’impôt en soutien à l’installation d’infrastructures de recharge et des aides locales de soutien pour les entreprises et les taxis franciliens, les taxis parisiens, et les particuliers dans les Bouches-du-Rhône par exemple.
Pour en savoir plus sur votre cas particulier, cliquez juste ici.
Chaque constructeur gère ses usines différemment. Dans la plupart des cas, d’importantes délocalisations ont été opérées dans les dernières décennies. En complément, des contraintes croissantes sont venues s’ajouter sur l’extraction de minerais nécessaires à l'électronique et aux batteries.
D’un côté, la transformation de matières premières en matériaux ; de l’autre, l’assemblage du véhicule. Exploiter une même usine pour opérer ces 2 activités permettrait d’éviter deux étapes actuelles de transports internationaux (depuis l’usine d’assemblage et vers le client final).
Relocaliser les usines dans des pays développés permet aussi de se confronter à des normes environnementales plus exigeantes et donc de rechercher de nouveaux procédés d’extractions et de transformations plus écologiques.
Cela va généralement de pair avec la relocalisation. Ré-organiser l’activité d’extraction de minerais pourrait permettre d’accélérer le développement de techniques moins toxiques et plus durables d’exploitations des terres.
🖐 Lors du Battery-Day, Tesla a clairement annoncé rechercher des terres aux Etats-Unis pour extraire du lithium et peut-être trouver une autre manière plus écologique de produire du lithium.
Prolonger la durée de vie d'un bloc de batteries peut être encore plus efficace que son recyclage, tant pour des raisons environnementales que commerciales. Avant de mettre hors-service un bloc grand public et de l'envoyer au recyclage, un constructeur a tout intérêt à renforcer sa R&D pour prolonger la vie utile de chaque bloc de piles.
Il y a aussi le principe de closed-loop qui consiste à intégrer dans la production des produits, des matériaux issus des produits en fin de vie.
Un autre moyen de réduire le bilan carbone d’une voiture électrique : limiter le nombre de pièces utilisées - environ 30 000 pièces sont nécessaires aujourd’hui.
Reprenons l’exemple de Tesla, constructeur qui a la particularité d’être excédentaire en énergie pour la fabrication de ses voitures électriques. Il produit ainsi plus d'électricité renouvelable - via les panneaux solaires installés sur les toits - qu’il n’en utilise pour produire ses véhicules. Cela reste un premier pas, et il est évidemment nécessaire d’aller plus loin.
Et ce n’est pas valable que pour les voitures électriques 🙃
Si on estime qu'un véhicule est mis à la casse après 200 000 kilomètres environ, la création d'une batterie pouvant tenir jusqu’à 1 610 000 kilomètres (soit 4 000 à 5 000 cycles de charge) réduirait considérablement les émissions par véhicule produit.
Un véhicule équipé d'une telle batterie pourrait être utilisé 8 fois plus qu'un véhicule moyen vendu en Europe. Son utilisation sur ces 1 610 000 kilomètres limiterait significativement son bilan carbone sur toute sa durée de vie.
Une voiture électrique consomme bien évidemment... de l’électricité. Jouer sur la part de sources de production d’énergies renouvelables dans le mix énergétique d’un pays (comme les éoliennes ou les panneaux solaires photovoltaïques) réduit mécaniquement le bilan carbone d’une voiture électrique !
Voici la liste des facteurs d'émissions des sources d’énergies de production de l'électricité. Par convention, il ne prennent pas en compte la fin de vie des installations :
Filières Nucléaire & Renouvelables
Filières Fossiles
🖐 Bon à savoir : le gestionnaire de réseau de transport d’électricité RTE propose sur son site de visualiser le mix instantané de production d’électricité ainsi que les émissions de CO2e associées.
Lorsqu’on freine avec un véhicule électrique, on peut recharger (légèrement) sa batterie. C’est le principe du freinage régénératif ! Dès lors, optimiser cette technologie permettrait de gagner toujours plus en efficacité.
Le train moteur qui restitue l’énergie mécanique aux roues gagnerait, lui aussi, à être amélioré. En quelques années seulement, l’efficacité en km (EPA)/kWh est passée de 5 à 7,7 km(EPA) / kWh pour les modèles considérés comme les plus efficaces du marché.
Sur 149 propositions de la convention citoyenne pour le climat, une dizaine concerne les transports.
Inciter à l’utilisation des véhicules les moins polluants. Et proposé un bonus d’un montant maximal de 9 000 € à 10 000 € pour les pays d’Outre-mer (où le prix des véhicules est plus élevé) « en répartissant le mode de calcul entre les émissions de CO2e et le poids des véhicules. En contrepartie, le montant du malus devra être augmenté et son seuil, actuellement à 110 g CO2/kilomètre, abaissé.
Ces prêts garantis pourraient être créés via un fonds national. Ils seraient limités à des gammes de véhicules légers et à des prix abordables.
Selon les 150, la voiture individuelle ne doit plus être le mode de transport privilégié des trajets domicile-travail. Pour cela, il s’agit de renforcer le soutien aux transports plus sobres, aux aménagements de l’espace public et aux contraintes de vitesses autorisées.
Le Forfait Mobilités Durables pourrait devenir obligatoire et son indemnisation être revue à la hausse, notamment dans les zones rurales ou pour les ménages précaires.
Des voies réservées aux véhicules partagés et aux transports collectifs seraient créées sur les autoroutes et voies rapides.
Une réduction de la vitesse maximale à 110 km/h sur autoroute est évoquée : « Les avantages pour le climat sont réels puisqu'ils permettent une réduction de 20 % des émissions de gaz à effet de serre en moyenne sur ces transports.». Aussi, l'allongement des temps de trajets serait léger, entre 4 à 8 minutes par heure.
L’idée serait de développer les trains au-delà du TGV. Pourquoi ne pas réduire la TVA actuelle à 5,5% au lieu des 10% sur le prix du billet de train ?
Le poste des trajets domicile-travail est un poste souvent très important du bilan carbone d’une entreprise si les employés viennent principalement en voiture.
Le covoiturage est un des principaux leviers recommandés par la Méthode Bilan Carbone pour réduire ses émissions de CO2.
La climatisation augmente la consommation de carburant : en ville, de l’ordre de 2 l/100 km, sur route et autoroute, environ 0,4 l/100 km et en moyenne autour de 1 l/100 km pour les véhicules les plus récents. Cela limite les progrès pourtant importants qui visent à limiter la consommation énergétique des véhicules.
La voiture représente un poste conséquent d’émissions de GES des ménages français. Au même titre que toute autre avancée technologique, il est donc primordial de limiter dès aujourd'hui le bilan carbone de nos voitures électriques.