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L’industrie des jeux vidéo n’est pas soumise aux mêmes critiques sur son impact environnemental que d’autres industries comme l’aviation ou le numérique. Pourtant, avec le tournant du « cloud gaming », que le secteur est en train de prendre, il est temps de se pencher sur l'empreinte carbone des jeux vidéo - un marché dans lequel le « toujours plus » règne en matière de consommation. Xbox (Microsoft), Playstation (Sony), Wii (Nintendo)... Va-t-on assister à la disparition des consoles ? Et est-ce une bonne nouvelle pour notre empreinte carbone ?
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D’abord les chiffres.
Ou plutôt les quelques chiffres que nous avons. Selon l’expert indépendant en numérique Frédéric Bordage, auteur de l’un des seuls articles sur la question en France, « la chaîne du jeu vidéo sur consoles émettrait 37 millions de tonnes d’équivalent CO2 ». A titre de comparaison, c’est 600 millions pour l’aviation.
Alors pourquoi s’y intéresser ? Parce que, chose rare lorsqu’il s’agit d’empreinte carbone, pour les jeux vidéo on peut encore éviter le pire.
L’entrée dans le Cloud Gaming
Des jeux vidéo dématérialisés, c’est séduisant 😍
Après la musique et le cinéma, c’est au tour de l’industrie des jeux vidéo d’entrer dans l’arène du dématérialisé, avec l’arrivée du « cloud gaming ». La promesse des services de jeux en streaming est assez alléchante. Jouer à GTA, Assassin’s Creed ou Doom avec une expérience proche d’une Playstation ou d’un Xbox mais...sans console ni disque. Le tout de n’importe où dans le monde à condition d’avoir une (bonne) connexion à Internet.
Mais que fait Google ?
Se passer d’une console ou d’un PC pour jouer à ces jeux vous paraît saugrenu ? Pour estimer le niveau de maturité d’un marché, rien ne vaut l’observation du comportement des GAFAM. Et à la vue de leurs derniers agissements dans le secteur du « cloud computing », « prometteur » serait un euphémisme.
Google a lancé Stadia en 2019, Microsoft a présenté xCloud en 2020 et on attend Luna, la réponse d’Amazon cette année.
Ces jolies noms n'accompagnent pas la sortie de nouvelles consoles, mais de services de jeux vidéo à la carte sur le modèle d’un Netflix ou MyCanal. On peut donc s’attendre, comme pour la VOD il y a quelques années, à une déferlante d’acteurs. Et avec, un changement radical des habitudes de consommation.
Empreinte carbone des jeux vidéo : pourquoi s’en inquiéter ?
Des nouvelles qui se veulent rassurantes 🧘♀
A première vue, il s’agit d’une bonne nouvelle pour l’écologie. Moins de consoles, de PC et de jeux sur disque, c’est avant tout moins de produits, matières premières, énergie et transport. Le cycle de vie d’une Playstation 4 équivaut, par exemple, à la production de 89 kilos de CO2.
Et les premiers acteurs du secteur du numérique vont dans ce sens. « Il n’y a pas de plastique, pas de composants chez soi. Pour fonctionner, une Google Chromecast n’a besoin que de quelques watts de puissance électrique, et non de plusieurs centaines comme pour un PC de jeu », selon Majd Bakar, ingénieur en chef du projet Stadia dans Le Monde.
Même son de joystick chez Stéphane Quentin, porte-parole de Nvidia France, l’offre de Sony. « Accéder à des ressources de calcul à la demande pour ne jouer, par exemple, qu’à un seul jeu pendant quelques dizaines d’heures est nettement plus écologique que d’acheter une console qui finira par prendre la poussière. »
Envie de devenir incollable sur le Bilan Carbone ?
Toujours la même histoire
Comme vous êtes dorénavant incollable sur l’impact du numérique sur l’environnement, vous savez que le streaming n’est pas une solution pour réduire les émissions de carbone.
Et cela a déjà été chiffré. Trois chercheurs de l’université de Lancaster, ont émis dans une étude publiée en juin 2020 et relaté dans le dernier numéro du magazine Socialter, trois hypothèses sur l’impact du streaming liée à l’industrie des jeux vidéo :
- Si le « cloud computing » reste un marché de niche, les émissions de l’industrie des jeux vidéo atteindraient 1.5 milliards de tonnes en CO2 entre 2020 et 2030 ;
- En supposant que ⅓ des joueurs.ses troquent leur console de salon pour leur smartphone, ce chiffre croît alors de 30% ;
- Si cela devenait une habitude pour 9/10 des joueurs.ses sur les dix prochaines années, la facture carbone augmenterait de 112% par rapport à aujourd’hui.
Empreinte carbone des jeux vidéo : comment expliquer un tel impact ?
Streaming : des données en veux-tu en voilà
Sans console ou PC pour réaliser les calculs nécessaires au fonctionnement d’un jeu, ce sont les data centers qui prendront le relais. Or un data center a besoin de beaucoup d’énergie (d’électricité principalement) pour répondre à une demande toujours plus forte en traitements de données. Une production d’énergie qui provient encore et en grande majorité du charbon dans le monde.
Si nous assistons à un transfert massif des jeux vidéo classiques vers le « cloud gaming », nous ferons d’ici quelques années le même constat simple que sur la vidéo sur Internet. Ça pollue la planète.
Vous allez nous rétorquer que la consommation n’est pas la même. Il y aura toujours plus de « binge watcher » que de gamers. C’est vrai. Mais les jeux vidéo exigent des débits plus élevés qu’une série en streaming : 15 Mbit/s contre 3 à 8 Mbit/s pour les meilleurs services de vidéo à la demande, selon les chiffres de Nvidia.
Empreinte carbone des jeux vidéos : des écrans toujours plus énergivores ⚡
Il est un élément qui restera indispensable pour les joueurs.ses : l’écran. Et cet écran devient de plus en plus performant, donc énergivore. Comme souvent, c’est une question de taille. Plus l’écran est grand et performant, plus sa consommation et son impact sur l’environnement seront élevés.
Dix minutes du jeu Metro Exodus sur PC en HD équivaut à 2 Go de données. Passer en 4K et vous serez à 3,1 Go selon une équipe de chercheurs de Lancaster. Anecdotique ? Si vous avez lu le paragraphe précédent, pas vraiment.
🖐 Cette même équipe de chercheurs conclut son rapport en étant certes drôle, mais très claire : « Si (la 4K) se répand, ce pourrait bien être synonyme de Game Over ». Toujours plus de pollution numérique donc.
Un effet rebond, encore un 🏀
On peut imaginer que les joueurs.ses ne vont pas troquer leur console ou leur PC ultra-puissant pour uniquement s’adonner à leurs jeux favoris sur un smartphone. Et, dans le même temps, on peut espérer que les data centers seront de plus en plus alimentés grâce aux énergies renouvelables. Un double raisonnement qui atténue les inquiétudes sur les effets du « cloud gaming ».
Or comme pour la vidéo en ligne, plus le service de streaming est facile d’accès et performant plus sa consommation sera importante. Le « cloud gaming » permettra d’ici quelques années à des millions de nouveaux joueurs.ses, qui n’ont la dernière console de Sony ou de Microsoft, ni PC de profiter des meilleurs jeux en dématérialisé. Donc même si l'efficacité énergétique des data centers s’améliore, l’effet rebond annulera les économies d’énergies.
Nos 4 conseils pour continuer à jouer aux jeux vidéo en réduisant son empreinte carbone
🤖 Gardez votre console - Xbox, Playstation, Nintendo Switch - ou votre PC le plus longtemps possible
🖥 Ne craquez pas pour un écran 4K
☝️ Concentrez-vous sur un seul jeu à la fois, sur une seule console - et essayez de le terminer 😅
🛒 Privilégiez l’achat de jeux en physique, non dématérialisés, et surtout d’occasion pour votre console ou votre PC
Et pour découvrir des jeux vidéo éco-conçus qui ne se renouvelle pas chaque année sur consoles ou PC, avec des éditeurs soucieux de limiter la pollution numérique en réduisant leur empreinte carbone, cet article vous guidera.