Théâtre de rue : la compagnie Marzouk Machine défie l'apocalypse

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màj en avril 2024

La compagnie de théâtre Marzouk Machine s’est donnée pour simple mission de sauver l’humanité. Comment ? En montrant qu’un monde meilleur est non seulement possible, mais aussi à portée de main. Directrice artistique de la compagnie et autrice et metteuse en scène du spectacle Apocalypse, Sarah Daugas Marzouk nous raconte comment lui est venue cette idée un peu étonnante d’une société alternative située 50 ans après la fin du monde tel qu’on le connaît. Absurde ? Peut-être pas tant que ça finalement…

Comment est né ce projet de pièce post-apocalyptique ?

Sarah Daugas Marzouk : L’idée du spectacle est née en 2017, à partir d’une prise de conscience et d’une envie de créer quelque chose qui fasse office de « coup de poing ». Je voulais marquer les esprits sur la réalité de ce qu'est notre catastrophe écologique, et à quel point elle est emboîtée dans d'autres crises sociales, économiques, humanitaires, etc.

À cette époque, il y avait l'urgence de faire apparaître – et même sur-apparaître – la gravité de la situation ; de dire qu'on allait devoir résoudre toutes ces crises, non pas séparément, mais ensemble. On était encore à des années-lumières de comprendre la gravité du problème.

Pouvez-vous nous en dire plus sur cette prise de conscience ?

S. D. M. : J'avais alors 27 ans, et je trouvais très cynique la manière dont nos parents et leur génération avaient de nous parler de la crise climatique. Je me souviens des repas de famille lors desquels, dans la même phrase, quelqu’un pouvait dire : « Vous, les jeunes, la vie, vous allez en chier… », puis : « Allez, champagne ! Au fait, vous avez prévu de partir en vacances cet été ? ».

Il y avait un cynisme que je trouvais à la fois très théâtral et amusant, et en même temps, qui me perturbait profondément. Finalement, j’ai l’impression que toutes les générations vivent un peu ce truc où on nous dit que notre avenir est compromis, mais pour autant on ne change rien. Alors le spectacle est né avec cette urgence et une envie de secouer, de faire bouger les choses. Sans forcément dire comment faire, mais en essayant de donner des pistes de prise en main collective de notre destin.

© Loïc Nys

Notre démocratie est-elle vraiment capable de résoudre ces crises ?

S. D. M. : Ce qui me choquait aussi beaucoup à l’époque, c’est que je trouvais qu'en tant que citoyen ou citoyenne, on était bien peu armés de moyens démocratiques.

Mon constat revenait à se dire : « On est en période de crise, et on a une société qui n'est pas capable de la gérer. Les luttes ne marchent pas. Les manifestations ne marchent pas. Les pétitions, n'en parlons même pas… ». Et je me suis posée la question : finalement notre démocratie est-elle capable de résoudre ces crises ? Et surtout, est-ce qu’elle en a vraiment envie ?

J'ai donc imaginé une fiction qui partait du principe qu’on n’allait pas réussir à résoudre cette crise, que tout allait empirer. J’ai imaginé un truc un peu absurde où, à l'échelle de 50-70 ans, tout s’est effondré et on a complètement basculé dans un autre monde, où le capitalisme a disparu, et nous vivons dans les ruines de notre société.

Pourquoi avez-vous choisi d'explorer la figure de l'effondrement ?

S. D. M : En 2017, alors que je suis en train de faire des recherches pour la pièce, un copain me dit : « Il faut absolument que tu lises Comment tout peut s'effondrer de Pablo Servigne et Raphaël Stevens ».

Donc je vais à la bibliothèque, je prends ce bouquin, et là je me rends compte que mon idée de fiction était en fait une réalité plus que possible, et même étudiée… Je prends alors conscience qu’il y a là un vrai sujet à explorer ; de réflexion, de recherche scientifique, politique, philosophique, etc.

À partir de ce moment-là, la collapsologie est un peu devenue la bible du spectacle, un appui pour raconter cette crise que je m'amusais à inventer.

L’enjeu était pour moi d’amener les gens à passer de : « Ah ok, on a un problème écologique » à « Ah, notre société est en train de s'effondrer ». Et finalement, de s’interroger sur ce que ça, implique une société qui s'effondre.

Affiche du spectacle Apocalypse © Marzouk Machine

Pensez-vous que les mentalités ont évolué depuis l’écriture de la pièce ?

S. D. M. : Oui et non. Ces dernières années, notre société a changé. On a été impactés par des sécheresses, des événements climatiques extrêmes, le Covid… En 2017, on pouvait encore se dire « ça arrivera peut-être un jour, mais bon, c'est pas demain la veille ». Aujourd’hui, plus personne ne peut vraiment douter que ces problématiques vont exister et impacter nos vies quotidiennes.

Malheureusement, malgré ce constat, il y a autant d'inaction aujourd’hui qu’il y a sept ans… Maintenant que l’on sait et qu'on est tous à peu près d'accord que la situation est grave, je me demande pourquoi nous n’agissons pas davantage ?

Est-ce que ce n'est pas parce que l'horizon semble bouché ?

S. D. M. : Les personnes qui ont étudié et écrit sur ces sujets de crises (écologique, sociétale, politique…) disent tous que l’on a besoin de nouveaux récits. C’est aussi pour ça qu’à travers ce spectacle, je me suis donnée la mission d’imaginer une autre forme de société.

J’ai envie qu’on se dise : « puisque cette fiction imagine une société qui n'est plus capitaliste, peut-être est-ce réellement possible » ; que ce qui est maintenant n'est pas gravé dans le marbre, mais qu'on peut inventer d'autres systèmes, et qu'on en est capable !

Sur quoi travaillez-vous actuellement ?

S. D. M. : Avec la compagnie, on projette de sortir un spectacle en 2026, dans la continuité d’Apocalypse. L’idée est de pousser ce questionnement existentiel, en s’attaquant à un sujet un peu touchy : en quoi notre conception de la liberté pose-t-elle un problème, et est-elle liée au fait que notre société n'agit pas…

Retrouvez ici les dates de tournée du spectacle Apocalypse

Photo à la Une : © Loïc Nys

Estelle Serrero
Estelle est rédactrice web freelance. Par sa plume, elle s'engage à rendre visible tout sujet lié à l'Eau, l'Énergie et l'Environnement.
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