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Trier ses déchets, ramener ses médicaments en pharmacie, ses piles au supermarché… Des gestes qui peuvent sembler anodins et pourtant… Ils sont indispensables aux filières de tri que les fabricants doivent mettre en place. C’est le principe de la responsabilité élargie du producteur, REP. Carbo vous donne les clés pour tout comprendre.
Qu’est-ce que les filières REP ?
Principe & objectifs : un producteur « responsabilisé »
REP est l’acronyme de « Responsabilité élargie du producteur ». C’est une application du principe « pollueur-payeur », inscrit dans la charte de l’environnement : « Toute personne doit contribuer à la réparation des dommages qu’elle cause à l’environnement ».
En clair : la personne qui fabrique, importe ou distribue un produit est responsable de l’ensemble du cycle de vie de ce produit. De sa conception jusqu’à sa fin de vie.
Le producteur est donc responsable de financer ou d’organiser la gestion des déchets issus de ces produits en fin de vie, comme des solutions de collecte, de réutilisation ou de recyclage. Et plus un produit est polluant, plus les coûts pour sa fin de vie sont importants pour le producteur.
Ainsi, le producteur prend conscience des coûts induits par son activité et des déchets générés. Il peut donc intégrer les coûts de cette gestion des déchets dans le coût du produit. Ce qui l’incite à l’eco-conception pour réduire ces coûts.
L'éco-conception peut passer par la robustesse de ce produit, le fait qu’il soit réparable, démontable ou recyclable. Une conception vertueuse, en quelque sorte.
Le principe de la REP a pour objectif final de réduire la production de déchets, surtout lorsque l’on sait qu’il est de plus en plus difficile de trouver des lieux de stockage et de traitement de ces déchets.
Contexte de mise en place
Cocorico. La France est un pays précurseur. Le principe des filières REP a été introduit en 1975 avec la loi relative à l’élimination des déchets et à la récupération des matériaux (article L. 541-10 du code de l’environnement) : « Il peut être fait obligation aux producteurs, importateurs et distributeurs de ces produits ou des éléments et matériaux entrant dans leur fabrication de pourvoir ou de contribuer à l’élimination des déchets qui en proviennent.»
Il faut attendre 1992 pour que ce principe soit réellement appliqué, avec le décret du 1er avril relatif aux emballages ménagers. Par la suite, il s’étend à d’autres filières de produits comme les équipements électriques, les piles, les papiers etc.
16 ans plus tard, la Responsabilité élargie du producteur est adoptée par l’Europe, définie dans la directive relative aux déchets (2008/98/CE) comme « l'un des moyens de soutenir la conception et la fabrication de produits selon des procédés qui prennent pleinement en compte et facilitent l'utilisation efficace des ressources tout au long de leur cycle de vie, y compris en matière de réparation, de réemploi, de démontage et de recyclage ».
En 2010 en France, la loi Grenelle 2, à l’issue du Grenelle de l’environnement, précise les responsabilités des acteurs dans le cadre d’une filière REP et introduit le rôle des eco-organismes :
« Les producteurs, importateurs et distributeurs (…) s’acquittent de leur obligation en mettant en place des systèmes individuels de collecte et de traitement des déchets issus de leurs produits ou en mettant en place collectivement des eco-organismes (…) ».
Loi Grenelle 2 - 2010
Systèmes individuels de collecte, eco-organismes… des explications s’imposent.
Fonctionnement des eco-organismes
Pour s’acquitter de leurs obligations, les producteurs ont donc le choix. Ils peuvent soit mettre en place des structures collectives à but non lucratif, les eco-organismes, soit former leur propre système individuel.
Dans la majorité des cas, les producteurs choisissent de s’organiser collectivement et donc de passer par des eco-organismes. Ces derniers endossent alors la responsabilité des producteurs adhérents.
Voici comment cela fonctionne : pour chaque produit mis sur le marché, le producteur doit verser une cotisation financière, appelée eco-contribution, à l’eco-organisme auquel il adhère.
🖐️ Le montant de l’eco-contribution est lié au type de produit ainsi qu’au coût de gestion du déchet en fin de vie. Ces eco-contributions versées aux éco-organismes permettent de financer l’ensemble des obligations des producteurs comme la collecte, le tri, le recyclage des déchets.
Missions des eco-organismes
Les eco-organismes sont agréés par l’État pour 6 ans maximum et s’engagent à respecter un cahier des charges comprenant des objectifs de collecte et de recyclage. L’État veille à ce que ces engagements soient tenus.
Par exemple, pour les piles, il existe deux eco-organismes : Corepile et Screlec. Pour les déchets d’ameublement, on trouve les eco-organismes Eco-mobilier ou Valdelia.
Si le producteur décide d’assurer lui-même ses obligations en mettant en place un système individuel, sans passer par des eco-organismes, il s’engage à assurer une reprise sans frais de tous ses produits devenus déchets sur le territoire national.
Pour se faire, ses produits doivent nécessairement comporter un marquage permettant d’identifier leur origine. Pour prévenir les éventuelles défaillances, une garantie financière est imposée au producteur.
Et si le producteur ne respecte pas ses obligations ? Il est soumis aux sanctions prévues à l’article L. 541-9-5 du code de l’environnement.
Enfin, il faut savoir que les systèmes individuels ou les eco-organismes peuvent solliciter l’accompagnement de l’ADEME (Direction de Supervision des filières REP) dans la réalisation des études et évaluations préalables à leur agrément.
Quels sont les acteurs concernés ?
Quand on parle de « producteur », cela implique toutes les entités chargées de gérer ses déchets. Cela peut être des personnes physiques ou morales.
Cela va du producteur initial d’un produit, au détenteur, négociant, fabricant, franchisé, assembleur, conditionneur, transporteur, distributeur, collecteur de déchets ou encore aux établissements mettant en œuvre les opérations de traitement de déchets.
Par extension, de nombreux autres acteurs sont concernés par le système de Responsabilité élargie du producteur, notamment les pouvoirs publics qui fixent les objectifs et les modalités d’organisation de ces filières, les eco-organismes ou les citoyens et professionnels en tant que consommateurs et détenteurs de déchets à trier.
Quelles sont les filières soumises à la REP ?
Il existe 14 filières obligatoires en France :
- les piles et accumulateurs
- les équipements électriques et électroniques (EEE)
- les véhicules hors d’usage
- les emballages ménagers
- les médicaments non utilisés
- les pneus
- les papiers graphiques ménagers
- les textiles et chaussures
- les produits chimiques ménagers
- les meubles
- les bouteilles de gaz
- les bateaux hors d’usage
- les objets perforants des patients en autotraitement (DASRI)
- les fluides frigorigènes
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Quelles sont les nouveautés de la loi AGEC relatives aux filières REP ?
La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire, dite loi AGEC, promulguée le 10 février 2020, a été le point de départ du changement de modèle de production et de consommation pour limiter les déchets et préserver la planète.
A partir de cette loi, le système d’organisation des filières REP a été transformé en profondeur. L’objectif n’étant plus seulement de traiter les déchets mais également de prévenir leur production.
À la douzaine de filières à REP existantes en France, la loi AGEC a prévu de créer, de 2021 à 2025, une dizaine de filières supplémentaires en vue d’étendre la responsabilité des industriels :
- les produits du tabac
- les jouets
- les articles de sport et de loisirs
- les articles de bricolage et de jardin
- les produits ou matériaux de construction du bâtiment
- les voitures, camionnettes, véhicules à moteur à deux ou trois roues et les quadricycles à moteur
- les huiles minérales ou synthétiques, lubrifiantes ou industrielles,
- les chewing-gums
- les textiles sanitaires à usage unique, y compris les lingettes pré imbibées
- les engins de pêche contenant du plastique.
La loi a également étendu le périmètre de certaines filières. Par exemple les emballages ménagers, filière qui comprend désormais les emballages professionnels.
La réforme du fonctionnement des REP
Autre évolution, les eco-organismes doivent mettre en œuvre un système de primes et pénalités pour atteindre leurs objectifs. Les primes ou pénalités sont calculées selon des critères environnementaux liés à l’eco-conception des produits.
Cela permet de faire prendre conscience aux producteurs de l’intérêt des produits qui peuvent être triés et recyclés facilement par exemple. C’est l’eco-contribution.
Des fonds réparation et réemploi ont également été introduits par la loi Agec. L’objectif du fonds réparation est de réduire le coût de réparation pour quelqu’un qui se rend chez un réparateur labellisé.
Le fonds réemploi sert à donner une seconde vie aux produits, en soutenant les acteurs de l’économie sociale et solidaire.
Les filières REP devront financer ces fonds via les eco-organismes ou systèmes individuels.