Pour sa 20ème édition, le festival Photo de La Gacilly invite ses 300 000 visiteurs à découvrir une sélection de clichés autour d’un thème unique : La Nature en Héritage. On vous met en bouche avec une sélection de cinq photographes qui invitent à voir le monde d’un nouvel œil.
Chaque année depuis 20 ans, du 1er juin au 1er octobre 2023, la petite cité de La Gacilly, dans le Morbihan, se gonfle de 300 000 âmes. Créé en 2004, le festival Photo est aujourd’hui le plus grand festival photo en plein air d'Europe. Sa vocation : présenter « le meilleur de la création photo contemporaine qui interroge notre relation au monde et à la nature », avec plus de 800 clichés – certains d’une taille atteignant 80 mètres carrés – exposés dans 21 lieux dispersés dans les rues, les jardins et les ruelles de la ville. Ce parti-pris lui permet de toucher des habitués, mais aussi des néophytes peu accoutumés à pousser la porte des musées. D’ordinaire, le festival compte une double thématique géographique et environnementale. Mais pour 2023 – édition anniversaire – c’est un seul thème qui a été retenu : La Nature en Héritage. Plongée dans l’univers du festival photo avec une sélection de 5 photographes qui ont retenu notre attention.
Luca Locatelli : science sans conscience ?
Pour comprendre le travail du photographe italien Luca Locatelli, il peut être utile de jeter un œil à son parcours : après un début de carrière en tant que développeur de logiciels, il devient photographe documentaire, avant de travailler, depuis 2015, pour le magazine National Geographic. C’est donc tout naturellement que l’on retrouve dans son travail un savant mélange de problématiques liées à l’innovation technologique et à l’influence de l’humain sur l’environnement. Dans le cadre de sa série de photos « Future Studies », commencée dès 2011, il capture les marques d’un monde qui essaie de trouver l’équilibre entre l’innovation et la préservation de son environnement naturel : des fermes agricoles en circuit fermé à perte de vue au Pays-Bas, un réacteur nucléaire allemand transformé en parc d’attraction, le champ d’éoliennes d’un village allemand auto-suffisant… De quoi donner un petit goût de S-F devant des clichés pourtant ultra-réalistes, une manière pour le photographe d’inviter ses spectateurs à s’interroger sur la précarité de notre empreinte sur le monde.
xc : R.I.P. les avions
Photojournaliste et photographe brésilien, Cassio Vasconcellos présente cette année à La Gacilly une gigantesque fresque de 12 mètres de long représentant la vue aérienne – fictive – d’un cimetière d’avions. Minutieux montage créé à partir de clichés pris aux États-Unis et à Sao Paulo (avec détourage des avions un à un et report des ombres à la main), le cliché exacerbe le réel pour mieux interpeller les individus sur l’impact de nos modes de déplacement sur le monde.
Evgenia Arbugaeva : Voyage aux portes du monde
Photographe de l’Arctique russe, Evgenia Arbugaeva a grandi en Sibérie, où elle a appris à connaître les conditions de vie difficile des habitants de l’extrême nord. Evgenia ne prend pas seulement des photos, elle tisse des liens avec les personnes dont elle saisit le quotidien : là un couple gardien de phare, ici un homme dévoué à la tenue solitaire d’un poste météorologique, là encore un groupe de chasseurs de morses et de baleines. Son travail, à mi-chemin entre la photographie documentaire et une approche onirique, rappelle la fragilité de l’habitabilité de la Terre et montre qu’il y a de la beauté dans ce territoire, malgré les difficultés rencontrées par ses occupants pour y habiter.
Beth Moon : Patrimoine arboricole de l’Humanité
Photographe américaine, Beth Moon est une chasseuse d’arbres. Avec son appareil photo, elle capture des clichés des spécimens les plus atypiques de la planète : des millénaires, des géants, ou encore des porteurs d’histoires incroyables. Pour dénicher ces arbres à l’allure immortelle, Beth n’hésite pas à s’aventurer (très) en dehors des chemins battus, dans des zones végétales préservées de l’activité humaine. Parmi ses trouvailles les plus emblématiques, on peut citer le dragonnier de Socotra – ou « arbre au sang du dragon » pour la couleur rouge de sa résine – une espèce endémique d’une petite île d’un archipel du Yémen, aujourd’hui menacée par la sécheresse et les tempêtes. Sorte de parasol ou de champignon géant, l’arbre en impose par son diamètre, sublimé par la technique de la photographe.
Maxime Riché : Les flammes de l’enfer au Paradise
Photographe français, Maxime Riché réalise ce qu’il appelle lui-même un travail « documentaire spéculatif » pour « explore[r] notre refus des limites et notre capacité d’adaptation face aux bouleversements de notre environnement ». À travers sa série exposée à La Gacilly, il raconte une histoire singulière : celle de la ville de Paradise, et du comté californien de Butte, ravagés par un incendie long de 18 jours en 2018 puis par un mégafeu de 2 mois et demi à l’été 2021. Maxime Riché documente la vie post-incendie dans cet univers « brutalement inhospitalier ». Ses photos, passées au filtre infrarouge pour matérialiser la menace constante d’un nouveau mégafeu, témoignent malgré tout de la volonté de se relever et de (se) reconstruire.
Festival Photo de La Gacilly – Jusqu'au 1er octobre 2023 – Gratuit et en accès libre – Informations