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Lors de la COP26, trois secteurs ont été décrétés prioritaires pour leur décarbonation : l’industrie, le bâtiment et le transport. Rien de nouveau sous le soleil, ces secteurs produisent trop d’émissions de gaz à effet de serre et ont un impact direct sur le réchauffement climatique. Ils représentent en effet près de 60% des émissions de gaz à effet de serre de la France. Nécessité fait loi : il faut décarboner ces secteurs. Carbo vous éclaire sur le sujet.
Que signifie décarboner ?
Décarbonation, décarbonisation ou encore décarbonatation sont trois termes désignant une réduction de GES produits lors du processus de production. Cela implique donc un grand pas vers la transition énergétique, une production d’énergie made in énergies renouvelables afin de limiter ces émissions.
Décarboner répond à une logique de lutte contre le réchauffement climatique car les émissions de GES que nous émettons, comme le méthane et le dioxyde de carbone, provoquent un déséquilibre de l’effet de serre. Lorsque l'on décarbone l’économie et les secteurs les plus polluants, cela signifie que l'on modifie nos modes de production et d’exploitation actuels et que l'on recherche des alternatives pratiques et durables pour les générations futures.
Décarboner, énergie, émissions : ce qu’on veut dire par là…
Des objectifs nationaux à la hauteur de l’ambition climatique mondiale ?
Une neutralité carbone pour la France d’ici 2050 annoncée dans son Plan Climat en 2017 ? Possible si l’on divise les émissions de GES émises aujourd’hui par 9. Or, nous émettons (encore) toujours plus d’émissions, et ce, même en ayant mis en place des plafonds annuels prévus dans la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC).
Les enjeux liés à la décarbonation : bâtiment, transport, industrie
Aujourd’hui, ces trois secteurs représentent près de 60% des émissions de GES de la France.
Le secteur du bâtiment contribue à hauteur de 20% aux émissions de GES nationales. Il est donc considéré comme un secteur prioritaire. La Stratégie Nationale Bas Carbone prévoit une baisse des émissions de 50% pour 2030, un objectif très ambitieux. Aujourd’hui, les « passoires énergétiques » qui utilisent massivement l’énergie fossile pour le chauffage et qui conservent mal la chaleur, sont un des principaux challenges du secteur. On considère qu’en France, 8 millions d’habitations seraient des passoires énergétiques.
Tout l’enjeu serait donc de miser sur d’importants travaux de rénovation énergétique. Isolation thermique des bâtiments combiné à un basculement de l’énergie fossile vers des énergies renouvelables permettraient d’atteindre plus facilement les objectifs climatiques.
🖐 La RE2020 est une réglementation énergétique et environnementale qui reprend justement les engagements climat portés par la France ces dernières années. Elle sera progressivement mise en place d'ici janvier 2023.
Le secteur du transport est également alarmant : en effet, depuis 1990, il est le seul secteur à n’avoir pas réduit ses émissions de CO2. 30% des émissions de la France sont dûes au transport, soit 134 MtCO2 e en 2016 !
Pour ce secteur, les objectifs publics sont aussi ambitieux : la France mise sur une baisse de 40% des émissions du secteur pour l’horizon 2030. Or, aujourd’hui, le levier sur lequel agit les politiques publiques concerne les véhicules de particuliers (bonus et malus écologique ou encore l’encadrement des émissions des voitures neuves) alors que le secteurs aériens et maritimes ne sont pas encore dans le viseur de la loi, bien qu’extrêmement polluant
Quant au dernier secteur de l’industrie, il représente 18% des émissions du bilan carbone de la France, mais ce chiffre est à prendre avec des pincettes car la plupart des émissions sont exportées à l’étranger. En réalité, son impact est bien plus important
Comment décarboner ? L’ADEME présente 4 plans de décarbonation
Pour atteindre l’objectif neutralité carbone pour 2050 l’ADEME définit, quatre scénarios .Si on ne peut arrêter totalement d’émettre des émissions de GES, la solution se situe dans la réduction et dans la compensation carbone des entreprises. Ces scénarios sont inspirés des scénarios du rapport spécial 1,5 °C de 2018 du GIEC.
L’ADEME précise que « la réduction de la demande en énergie est le facteur clé ». Arnaud Leroy, président de l’ADEME précise qu’il est impératif d’agir rapidement » et mettre en place « une planification orchestrée des transformations, associant État, territoires, acteurs économiques et citoyens. »
Zoom sur ces quatre scénarios appliqués aux trois secteurs les plus polluants.
Scénario 1 : « Génération frugale » ou réduire les besoins énergétiques
Ce premier scénario impose la frugalité et la sobriété. La croissance économique s’interrompt pour laisser place à une décroissance à tous les niveaux :
- la sobriété technologique et le low tech favorisés,
- en ce qui concerne l’alimentation, une division par 3 de la consommation de viande. Et on mise sur une agriculture plus extensive.
Quels impacts pour l’industrie, le bâtiment et le transport ?
Pour l’industrie, le made in France est en vogue. Mais c’est toute l’économie qui est revue : une économie de la fonctionnalité et de la réparation combinée avec une baisse de la demande en biens et services. Le local, le made in France est boosté par la relocalisation de certaines filières. En chiffres, cela donne une part de 70% de l’acier, de l'aluminium, du verre, du papier-carton et des plastiques provenant du recyclage.
Pour le bâtiment, la construction est limitée, la rénovation énergétique est accélérée et les équipements mutualisés. Quant à la surface de construction de maisons individuelles neuves, elle est réduite de 30%,
Pour le transport, le scénario prévoit une « baisse de la demande de mobilité importante » et la mobilité durable comme la marche ou le vélo est favorisée tandis que la voiture ou l’avion sont en « fort retrait ». Par ailleurs, les zones rurales bénéficient de covoiturage et d’autostop. Ainsi, ce sont -26% de kilomètres parcourus au total en moins par rapport à l’année 2015.
Décarbonation du scénario 1 : quelle demande en énergie ?
Ce scénario divise la demande énergétique globale par deux grâce notamment à un usage des énergies fossiles et non renouvelables raisonné. Les usages se font principalement sans pétrole excepté ceux « spécifiques difficilement substituables ». Une baisse de la consommation énergétique entraîne une baisse de la consommation de gaz, qui devient « presque intégralement renouvelable ». Enfin, l’hydrogène est au cœur de la décarbonation.
Scénario 2 : « coopérations territoriales » ou le partage généralisé
Dans ce scénario, le partage et la coopération entre les acteurs priment pour viser le renforcement de la « cohésion sociale ». L’alimentation est plus végétale. L’ADEME évoque une « transition alimentaire » favorisant plus de sobriété afin de viser une baisse de 50% de la consommation de viande. Concernant l’énergie, on utilise du biocarburant.
Pour le bâtiment, on mise sur la rénovation que l'on accélère. Elle est accompagnée d’une densification en hauteur de la ville. Le partage des infrastructures permet de limiter la multiplication des équipements par exemple.
En ce qui concerne les transports, la proximité permet d’utiliser des moyens de transports plus écologiques tels que les trains, les vélos cargos ou mini-voitures. Pour le transport de biens et marchandises, la proximité est également au cœur du sujet : on double la part du ferroviaire et du fluvial, moyens de transport les moins polluants et les distances parcourues sont amoindries liées à un commerce de proximité favorisé. Cela permet d’atteindre un objectif de baisse de 17% de km parcourus par personne (aérien international compris)
Quant à l’industrie, les pouvoirs publics misent sur un développement régional et financent cette politique de recyclage et de valorisation des déchets. Certains secteurs font également l’objet d’une réindustrialisation.
Décarbonation du scénario 2 : quelle demande en énergie ?
La demande en énergie dans ce scénario se fonde sur la biomasse et l’électricité décarbonée. Si la production en électricité reste la même (chiffres de 2015), la consommation en gaz diminue et l’hydrogène permet de répondre au besoin.
Scénario 3 : les « technologies vertes » ou la décarbonation
Atteindre la neutralité carbone en misant sur les technologies vertes : un pari qui vise moins un changement de vie et qui entraîne moins de réduction énergétique par rapport aux autres scénarios. Ainsi, ce scénario mise donc tout sur la capacité de développement technologique de la société.
Pour le bâtiment, il s’agit moins d’une rénovation énergétique des infrastructures que d’une déconstruction pour mieux reconstruire. L’ADEME parle même de « déconstruction/reconstruction haussmannien de logements neufs et performants générant une consommation massive de ressources naturelles » . Un pas assez futuriste ! Bien évidemment, les matériaux et techniques de construction utilisés sont moins carbonés.
Pour le transport, on ne demande pas aux citoyen.nes de moins se déplacer comme dans le scénario 1. Ici, on mise sur les voitures électriques, on décarbone les flottes et l’énergie. « le report modal est faible et concentré dans les grandes villes et les grands axes des lignes ferroviaires et fluviales. »
Enfin, pour l’industrie, la consommation de biens et services ne diminue pas car la solution se situe dans la décarbonation du mix énergétique. Ainsi, on mise sur des échanges commerciaux entre les pays de l’UE et on utilise davantage les déchets dans la production et l’hydrogène et l’électricité sont les piliers de la décarbonation.
Décarbonation du scénario 3 : quelle demande en énergie ?
Ici, l’innovation et la recherche permettent la décarbonation car l’énergie est désormais décarbonée. L’énergie produite doit répondre à la demande énergétique générée par les besoins numériques et innovations technologiques. On utilise l’hydrogène pour tout ce qui touche aux importations ainsi que la biomasse (méthanisation et bois énergie). Le secteur du transport est le seul à utiliser des carburants fossiles à hauteur de 10%.
Scénario 4 : le « pari réparateur » ou le mode de vie d’aujourd’hui
Dans ce dernier scénario, nous gardons le même mode de vie que nous avons actuellement.
Pour le bâtiment, l’innovation technique permet de réduire l’impact environnemental. Les technologies permettent une efficacité énergétique optimale ce qui contribue au développement des grandes villes.
Pour le transport, « le numérique s’immisce dans les moteurs de véhicules et la gestion des mobilités » .
L’industrie, de son côté, est décarbonée grâce au captage et au stockage géologique de CO2. On ne mise pas dans ce scénario sur une production made in pays, mais plutôt une mondialisation toujours plus importante accompagnée d’échanges, d’importations et d’exportations. Les différentes innovations et technologies permettent d’exploiter toujours mieux et plus efficacement les ressources naturelles et le recyclage.
Décarbonation du scénario 4 : quelle demande en énergie ?
Ce scénario demande le plus d’énergie électrique et compense cette forte consommation. Plusieurs leviers de décarbonation existent : la biomasse, les biocarburants, les énergies renouvelables ou encore le biogaz. L’hydrogène n’a pas sa place dans ce scénario lié à la forte concurrence d’autres technologies.
Tableau récapitulatif des trois secteurs selon les quatre scénarios de l’ADEME
Transport | Bâtiment | Industrie | Demande finale énergétique en 2050 en TWH | |
Scénario 1 : Génération frugale | Mobilité douce, peu d’avion et de voiture et pratique du covoiturage/autostop pour les zones rurales | Rénovation rapide, construction limitée et modes de vie modifiés | Industries locales, relocalisées, made in France | 790 TWH |
Scénario 2 : Coopérations territoriales | Développement d’un réseau de proximité et accélération vers un transport fluvial et ferroviaire | Rénovation accélérée , densification en hauteur et partage des lieux et équipements | Développement régional, réindustrialisation de certains secteurs et financement de politiques | 833 TWH |
Scénario 3 : les technologies vertes | Voitures électriques et décarbonation des flottes et de l’énergie | Déconstruction/reconstruction et utilisation de matériaux moins carbonés | Décarbonation du mix énergétique et maintien d’une production | 1074 TWH |
Scénario 4 : le pari réparateur | le numérique gère les mobilités et s’intègre dans les voitures | Innovation technique et efficacité énergétique | Décarbonation grâce au captage et stockage du CO2 | 1360 TWH |
La société en 2050, selon les 4 scénarios de l’ADEME
Et vous, quel scénario préférez-vous ? 🎤
Ces trois secteurs sont de véritables leviers vers une décarbonation de notre économie. La question se pose de savoir comment les pouvoirs publics et les acteurs privés vont entreprendre cette démarche. Entreprise ou citoyen.ne, vous avez aussi les clefs en main pour décarboner votre quotidien : que ce soit lors de vos achats, lors de vos déplacements ou concernant le logement ou vos bureaux. Avec Carbo, calculez dès maintenant votre impact environnemental pour mieux réduire vos émissions de GES !