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NFRD, CSRD, DPEF… Il y a de quoi s’y perdre parmi toutes ces normes. Parlons aujourd’hui de la norme Non-Financial Reporting Directive. Elle est particulièrement clé puisque c’est celle qui est à l'origine du concept de reporting extra-financier pour les entreprises. On la résume souvent comme la norme de reporting de durabilité des entreprises. Autrement dit ? C’est celle qui a permis de poser un premier cadre sur cette stratégie de durabilité visant à intégrer non seulement la dimension financière mais aussi les enjeux sociaux et environnementaux dans le reporting des entreprises. Et justement, quelles informations sont intégrées dans ce reporting ? Quels sont les éléments obligatoires ? Quelles sont les entreprises concernées ? Explications.
💡 Rappel : un rapport financier a pour but de présenter une synthèse des documents comptables d’une entreprise. Ce rapport est généralement présenté à l’occasion de l’assemblée générale à la fin de chaque exercice comptable et s’appuie sur le bilan, le compte de résultat et les flux financiers.
Qu’est ce que la Non Financial Reporting Directive ?
Le contexte de la NFRD
NFRD est l’abréviation de Non-Financial Reporting Directive.
Et plus concrètement ? L’objectif de cette directive est de mettre l’information liée au développement durable au même niveau que l’information financière dans le reporting des entreprises. Autrement dit ? Ne plus tenir compte simplement des résultats financiers mais aussi de ce qu’il y a autour, les informations qui parraissaient pendant (trop) longtemps intangibles ou moins directes.
La seule performance financière ne suffit plus. La performance doit être analysée de manière plus globale, en intégrant l’ensemble des enjeux sociaux et environnementaux.
Les entreprises concernées
La directive NFRD concernait initialement un peu plus de 11 000 entreprises au sein de l’Union Européenne.
C’est un très bon début. Pour autant, afin d’être aligné avec les enjeux écologiques à venir, il s’agissait de voir plus grand. C’est pour cette raison que cette norme a peu à peu laissé sa place à une nouvelle version, plus complète et mise à jour : la directive CSRD. Nous y reviendrons un peu plus bas. À ce stade, retenez simplement que celle-ci va toucher plus de 50 000 entreprises.
Une directive de la commission européenne
Revenons sur ce qu’est concrètement la norme NFRD.
Cette dernière a été adoptée en 2014 par la Commission Européenne sous le nom de code : Directive 2014/95/EU. Elle est entrée en vigueur en 2018. Son objectif ? Définir un cadre clair pour que les entreprises intègrent les informations liées aux éléments extra-financiers de manière pertinente dans leur reporting. Plus précisément, l’idée est de détailler ces éléments dans le reporting extra-financier (aussi appelé Reporting ESG). Autrement dit ? Elles doivent pouvoir mesurer et analyser leurs implications sur les volets environnementaux, sociaux, ainsi que sur la gouvernance.
Finalement, cela rejoint la définition de la RSE au sens large et s’appuie également sur les fameux ODD tels que définis par l’ONU. Pour résumer, c’est une démarche visant à obliger les entreprises à tendre vers plus de transparence vis-à-vis de l’ensemble de ses parties prenantes (investisseurs, consommateurs, partenaires, fournisseurs, etc…).
👉 La RSE c’est la démarche qui consiste à analyser les impacts positifs d’une entreprise sur la société. La vision ESG se concentre elle sur la façon dont les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance peuvent affecter l’entreprise en terme de performance financière.
De la NFRD à la CSRD
Nous l’avons vu, avec la NFRD, une partie des entreprises a obligation de suivre et déclarer leurs performances sur les volets environnementaux, sociaux et de gouvernance. Précisons un point. Quand on parle de performance, il s’agit non seulement des impacts de l’entreprise mais aussi des risques encourus (par elle ainsi que sur son environnement).
Si la NFRD a été innovante dans le domaine du reporting extra-financier, elle a rapidement montré ses limites. Elle posait en effet les bases du sujet, mais n’allait pas suffisamment loin sur le point de la durabilité et du cadrage des informations. C’est la raison pour laquelle elle est peu à peu remplacée par une nouvelle norme plus complète et exigeante : la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive).
💡 Bon à savoir : pour la CSRD, le format digital va devenir obligatoire. Le dépôt se fera donc de manière électronique. L’objectif est ainsi de faciliter le processus de publication des données extra financières et de simplifier l’exploitation des données.
CSRD : Contexte clair, Solutions pratiques
Un livre concocté avec soin pour se préparer au reporting extra financier de la CSRD.
Les étapes de déploiement
Le déploiement se fait de manière progressive.
Voici un aperçu du calendrier avec pour chacun la première date de publication du reporting :
Quelles entreprises sont concernées par la NFRD ?
La NFRD visait en premier lieu les grandes entreprises.
Et plus concrètement ? Cette norme visait donc les grandes entreprises d’intérêt public de plus de 500 salariés (sociétés cotées, banques, compagnies d’assurances, etc…). Au total, cela représentait plus de 11 000 entreprises au sein de l’Union Européenne. L’idée est de démarrer en visant des entreprises qui ont les moyens de mettre en place ce type de rapport sans que cela impacte la bonne gestion du business. En d'autres mots ? Il s’agit de montrer l’exemple et de pouvoir ensuite élargir la démarche à un maximum d’entreprises.
💡 Les filiales de ces mêmes entreprises ne sont pas sujettes à la même obligation à condition que le siège de l’entreprise publie les informations requises pour l’ensemble du groupe.
En quoi consiste le reporting de la norme NFRD ?
Rentrons dans le vif du sujet.
La NFRD prend la forme d’un document qui vient en complément du reporting extra-financier de l’entreprise. Ce dernier peut intégrer différentes informations comme par exemple :
- La protection de l’environnement (biodiversité, gestion des déchets, etc…)
- La responsabilité sociale (recrutement, évolution de carrière, etc…)
- Le respect des droits de l’homme (inclusion, diversité, etc…)
- La lutte contre la corruption (avec les fournisseurs, partenaires, etc…)
👉 Il n’existe à ce stade pas de ligne directrice claire ou d’arborescence commune à toutes les entreprises. Libre à chacune de choisir les informations et points sur lesquels elle souhaite appuyer. Par ailleurs, dans la même lignée, il n’existe pas de ligne directrice contraignante. Autrement dit ? Le cadre est encore flou. Pour que l’on soit sûr d’avancer dans le bon sens, l'enjeu sera à terme de cadrer chaque élément de ce rapport, de préciser les informations qui doivent y figurer.
Zoom sur le DPEF : déclinaison française de la NFRD
La NFRD est une directive européenne.
Côté français, elle a été déclinée par le décret du 9 août 2017 sous le nom de Déclaration de Performance extra-financière (DPEF). Comme la NFRD, cette terminaison a disparu au 1er janvier 2024 pour laisser la place à la CSRD.
La DPEF cadrait trois points spécifiques qui devaient apparaître dans le rapport :
- La description des risques environnementaux, sociaux, gouvernementaux liés à l’entreprise
- Le détail des stratégies mises en place pour prévenir et réduire la survenance de ces risques
- Les résultats et avancées des stratégies mises en place
👉 Bon à savoir : la DPEF s’applique en France concerne environ 3800 entreprises.
3 éléments qui montrent que le reporting des entreprises va dans le bon sens
Outre l’obligation qui incombe à certaines entreprises, l’élaboration d’un reporting extra-financier présente des bénéfices non-négligeables.
Être dans les règles
Pour l’entreprise, il s’agit d’abord de respecter les règles (européennes et françaises).
Si certaines ont obligation de réaliser un reporting extra-financier dès aujourd’hui, pour d’autres, ce n’est pas encore le cas. Pour autant, tout laisse à penser que les choses vont prendre de l’ampleur et que cela deviendra à terme obligatoire pour tous. Et c’est une bonne chose. Cela veut dire que les entreprises et le monde économique s'alignent peu à peu sur les enjeux environnementaux.
👉 Si la démarche a longtemps été non contraignante, cela change. Les entreprises qui ont obligation de réaliser un reporting extra-financier sont sujettes à des sanctions (déclaration publique, ordonnance de cessation, sanctions financières, etc…) en cas de non respect de cette démarche. Ces sanctions peuvent prendre des formes variées selon le pays européen dans lequel l’entreprise est implantée.
Prouver son engagement
L’idée ? Faire ce que l’on dit et dire ce que l’on fait.
On le voit, prouver son engagement au-delà de l’aspect simplement financier peut être un véritable levier pour l’entreprise, et ce vis-à-vis de l’ensemble des parties prenantes.
Quelques exemples :
- Candidats : Cela permet d’améliorer l’image de sa marque employeur et de faciliter ainsi les recrutements. En effet, on voit de plus en plus d’études sur le sujet, les engagements de l'entreprise deviennent des éléments clés dans le choix de leur futur employeur.
- Investisseurs : Cette démarche permet de montrer que l’organisation ne tient pas compte simplement de l’élément financier mais bel et bien de tout ce qui peut impacter directement ou indirectement. Cela permet par ailleurs d’avoir plus de recul sur les enjeux à venir et de définir une stratégie pertinente et efficace.
- Partenaires / fournisseurs : Dans la même logique, la démarche engagée de la société peut être un vrai point fort notamment dans le cas d’appels d’offres ou appels à projets. Ce sont d’ailleurs des critères qui sont de plus en plus intégrés dès la phase d’appel. Pendant longtemps, ils ont été optionnels. Ils deviennent peu à peu essentiels.
- Clients : Une étude de Kantar publiée en 2020 montrait que “83 % des clients attendent des marques qu’elles adoptent des engagements RSE concrets”. Et c’était il y a déjà 4 ans. Les clients sont aujourd’hui toujours plus exigeants et attentifs à ces engagements.
Pour résumer, quel que soit le nom de la démarche et de la directive (NFRD, CSRD, DPEF, etc…), tout repose sur le fait d’intégrer l’entreprise de manière pérenne dans son environnement et de faire preuve de transparence. En répercussion, cette vision permet aussi à l’entreprise de développer des relations de confiance avec ses parties prenantes.
Améliorer sa performance
C’est la conséquence du point précédent.
Dès lors que l’organisation prouve sa démarche vis-à-vis de l’ensemble des parties prenantes clés (clients, partenaires, fournisseurs, etc…), c’est un excellent moyen de :
- Augmenter sa compétitivité : La NFRD n’est pas un poids, une contrainte de plus à respecter par l’entreprise. Au contraire, elle agit comme un levier permettant d’améliorer sa performance (augmenter les ventes, améliorer les marges, réduire les coûts, optimiser les processus et l’organisation en interne, etc…).
- Réduire les risques : Nous l’avons évoqué plus haut, la NFRD permet de prendre en compte tous les risques qui peuvent impacter les activités de l’entreprise. Dans la lignée, c’est une façon de mieux appréhender les enjeux à venir et de s’en prémunir le plus tôt possible.
Quelles sont les limites de la NFRD ?
Nous l’avons évoqué rapidement plus haut, la directive NFRD a des limites. Si depuis sa publication, elle a permis de poser les jalons d’une nouvelle vision du reporting, la démarche n’est pas parfaite. Voici un aperçu des deux principaux reproches qui lui sont faits :
- Le cadre : En effet, un reporting est imposé mais le sujet est peu détaillé. Il n’y a pas de ligne directrice, pas de point précis, pas de KPI communs. En d’autres mots ? Chaque organisation fait à sa sauce. Cette approche ne permet pas de comparer les données entre entreprises, entre secteurs, et donc d’avoir une approche globale et comparative.
- Les données : Cela rejoint le premier point mais ce qui est critiqué est aussi la faiblesse des informations partagées. Le reporting se base grandement sur du déclaratif. Certaines entreprises se contentent d’une description basique de leur modèle d'affaires et de la politique de développement durable. Et cela suffit.
La NFRD résumée
NFRD / DPEF | CSRD | |
Échelle de la directive | NFRD (européenne) / DPEF (France) | CSRD (européenne) |
Année d’application | 2017 (aujourd’hui terminée) | 2024 |
Organisations concernées | > 11 000 en Europe | > 50 000 en Europe |
Données attendues | Description de la politique extra-financière | Stratégie ESG détaillée, KPI définis, plan d’action clair |
Prise en compte des risques climatiques | Ceux qui ont un impact sur l’entreprise | Principe de double matérialité (ce qui impact l’entreprise aussi bien que les impacts de l’entreprise sur son environnement) |
Un reporting qui s’adapte à un monde en transition
En matière de reporting des entreprises, les choses bougent. Lentement certes, mais elles bougent. Peu à peu, les États comme les sociétés s’adaptent aux nouvelles exigences climatiques. Les normes évoluent. Les données financières ne suffisent plus pour évaluer la performance des entreprises.